Panama : Le peuple Kuna ou Guna

Publié le 23 Octobre 2012

Les kunas

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Autre orthographe : Cuna

Groupe ethnique amérindien du panama qui vit principalement aux  îles San Blas.

Population : 50.000 personnes

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Langue : cuna ou dite dule gaya  qui est une langue chibcha. C’est une langue orale transmise par des chants et quelques hiéroglyphes qui est devenue récemment langue écrite.

Le mot cuna est un exonyme, eux se nomment Tule ce qui veut dire, les hommes, humain.

Ils font partie des derniers peuples autochtones à toujours contrôler leurs terres.

Ils vivent dans la comarca de Kuna yala comme ils aiment à la dénommer et qui veut dire terres des kunas en un statut d’autonomie.

Le nom donné à l’Amérique par les Cunas Abya Yala a été adopté en 1992 par les nations indigènes d’Amérique pour désigner ce continent au lieu de le nommer d’après Amerigo Vespucci. Abya yala veut dire : Terre dans sa pleine maturité.

Ils viennent probablement de Colombie, pays duquel ils furent chassés par les colons espagnols. Puis ensuite, des querelles avec les voisins embéras les poussent vers les côtes et la montagne. Leur origine lointaine reste une énigme. Des chercheurs pensent qu’ils  descendent des mays, leurs habitudes et l’utilisation du cacao leur font penser.

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Le taux de natalité chez les kunas est plus élevé que celui du Panama mais la mortalité aussi en raison des accidents dus à leurs  activités de pêche entre autre, des rixes dans les villes et des maladies épidémiques importées par les blancs.

Ils habitaient auparavant à l’intérieur des terres et en sont partis pour s’isoler des étrangers et éviter d’être contaminés par les maladies (paludisme).

La comarca

Obtenu après une révolte des Cunas en 1925, le Traité de Porvenir a été modifié en 1954 lorsque le gouvernement panaméen a donné aux îles San Blas le statut de réserve (comarca) incluant, outre l’autonomie, leur intégrité territoriale. La constitution du système confédéral régional a été rédigée en 1945 sous l’impulsion du chef Nele Kantule. Elle comporte trois points principaux :

  • la protection du commerce des noix de coco ;
  • la réaffirmation de l’autorité des chefs ;
  • le soutien à l’autorité des beaux-pères et au mariage matrilocal.

Ceci montre bien que les leaders de ce nouveau système étaient en fait les leaders traditionnels. En outre, Nele a introduit un système de coopératives volontaires (sociedades), réunissant à la fois les traditionalistes et les jeunes plus éduqués (agriculture, magasins, bateaux), des comités urbains, un système de travail communautaire et un réseau commercial de gros et de détail. La société cuna présente donc un compromis entre la « modernité » et la « tradition », ce qui a par exemple permis d’éviter des disparités dues aux inégalités sociales, en décourageant la création d’entreprises de type capitaliste basées sur la recherche du profit individuel, et en obligeant tous les individus à produire eux-mêmes leur nourriture (y compris les enseignants), ce qui a retardé l’apparition d’un style de vie de « classe moyenne » détaché de l’agriculture de subsistance.

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Mode de vie

Les pratiques traditionnelles sont restées conservatrices, la base de l’organisation du ménage reste la famille matrilocale, le travail s’effectue entre le beau-père et les gendres, les femmes portent encore des anneaux nasaux, qui tendent malgré tout à disparaître progressivement. C’est un peuple homogène malgré l’éparpillement des villages qui a un fort sentiment d’appartenance à la communauté.

Organisation sociale

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Salle du congreso

La vie communautaire tient une place importante dans le quotidien. Elle est régie dans chaque communauté par le congreso qui est dirigé par des sahila, des chefs coutumiers ou cacique. Ceux-ci aident les villageois dans leurs problèmes quotidiens et transmettent les traditions. La tradition se transmet depuis des générations à l’oral à travers des chants psalmodiés. Le sahila est le premier chef spirituel et il est assisté par d’autres sahila. Dans un village de 500/800 habitants, il y a trois sahila.

Le sahila est choisi par les habitants qui pour se faire tiennent compte de leur sagesse et de leurs connaissances des traditions ancestrales. Plusieurs fois par an les sahila se réunissent au niveau du district et deux fois par an pour des congreso general de la cultura.

Les problèmes concernant le village sont réglés tous les jours à 17 heures dans la maison du congreso. Chaque personne peut donner son avis et à la fin une décision unanime est prise confirmée par les sahila. La vie quotidienne est réglée également par des responsables : chef des maisons, chef du cimetière, chef des cocoteraies, chef du bois morts. Ils désignent les travaux communautaires à effectuer ainsi que les personnes qui en sont chargées.

Traditionnellement société matriarcale

Société uxorilocale (le jeune marié va habiter dans la maison de l’oncle de sa femme), endogame, le partenaire est choisi à l’intérieur du groupe poussant à un mariage préférentiel dans le clan à un parent proche comme le cousin ou la cousine. 

Tenue vestimentaire

Les femmes portent un paréo-jupe (sabured) par dessus un jupon serré en coton. C’est encore l’habit traditionnel coloré et travaillé, une tenue qui contraste avec celle des hommes qui est neutre. Elles ont toujours sur elle le foulard rouge et jaune ainsi qu’un anneau en or perçant la cloison nasale, des bracelets de perles de verre présentant parfois des figures agencée ornant les bras et les mollets. Elles gardent ses ornements jusqu’à leur mort changeant régulièrement les fils usés. La chemise porte souvent deux molas cousus comme ornement.

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Sobriété des tenues vestimentaires masculines……

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Exubérance des tenues féminines……

Peintures corporelles

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Les femmes se peignent l’arête du nez de noir de génipa.

L’habitat

Il est constitué de huttes (nega) petites, simples et dépouillées, constituées de gros poteaux enfoncés profondément dans le sol, complétés par des poutres horizontales en haut des cloisons (capables de supporter la traction des hamacs), le tout couvert par un toit de bambou et palme tressé.

Les huttes sont rassemblées dans un enclos contigu dépourvu de places de village et ces enclos sont surpeuplés.

Une grande hutte (nega tummad) sert de salle de séjour et de dortoir dans lesquels sont accrcochés les hamacs et seuls quelques tabourets viennent compléter le mobilier très sommaire.

Une seconde hutte (soenega), la maison du feu sert aux repas. Le feu y reste en permanence et il es ravivé à l’ide d’éventails tressés, biibi.

Les latrines sont publiques à part pour ceux qui habitent près du rivage et possèdent un ponton avec une hutte carrés servant de WC privé.

Une hutte existe pour la sieste, elle est sans murs et possède les hamacs.

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La pirogue

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On peut l’appeler aussi cayuco ou ulu.

C’est l’unique moyen de transport dans une région dépourvue de route ou de pistes. C’est le moyen de déplacement pour transporte les ressources, la pêche et aller travailler. Chaque famille possède au moins un ulu qui est manié par tous, petits et grands. Le ulu est construit  par un charpentier spécialisé à la machette et l’herminette dans un tronc de pin, puis goudronné, il ne dure guère plus de 5 à 8 ans . Des trous sont réalisés à plusieurs endroits pour garantir un bon équilibre. Les parties inférieures et la proue sont décorées de motifs colorés. La pagaie sert de rame et la pirogue possède des voiles cousues avec différents tissus de récupération. Les kunas sont de vrais marins émérites. Les hommes kuans sont les propriétaires des pirogues. Tout petit déjà, l’enfant kuna possède un modèle réduit de la pirogue de son père qui sera son premier jouet. Dans la cour intérieure un autre modèle sert pour les bains et les bains médicinaux.

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Les chamans

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Statuettes nuchu

Les kunas ont su garder intacte leur identité culturelle et ont bien résisté aux invasions. Leur médecine millénaire est donc encore bien ancrée dans leur mode de vie.

Pour conserver le bien-être de la Terre-Mère, cela découle de l’équilibre de sa nature spirituelle, tout comme celle d’un individu découle également du bon équilibre de son âme. L’équilibre rompu par la collectivité provoque des catastrophes naturelles et des épidémies. L’âme blessée à titre individuel provoque le dérèglement de la santé ou un accident.

Les shamans (nele) doivent entrer en contact avec les esprits, dialoguer avec eux et les convaincre d’apporte la guérison. L’esprit du shaman doit alors voyager dans les huit couches du royaume. Il y a les esprits du mal (boni) et pour les combattre les nuchu qui sont des statuettes en bois représentant des hommes d’une taille de 20/30 cm de hauteur.

Les trois spécialistes de la médecine kuna sont :

–         Le nele (homme ou femme) qui est le seul à posséder un pouvoir surnaturel inné

–         Le igar nuled : l’homme médecine qui est un botaniste aux connaissances impressionnantes. Il connait toutes les vertus des plantes  de la forêt équatoriale et sait les utiliser en remèdes, potions ou bains. Le caco tient une place importante dans les cérémonies. Par exemple des graines de cacao brûlent dans un mortier de terre cuite (sianor) dans la case du malade. Sa fumée contient des propriétés curatives et favorise les incantations adressées aux esprits. Le igar nuled n’a pas de pouvoir inné, ils résultent uniquement de son apprentissage.

–         Le igar wisid : le spécialiste des chants psalmodiés adressés aux esprits et à la maladie. Il n’a pas de pouvoir inné et doit étudier pour les acquérir.

Le diable, Nia a été créé par Baba pour justifier l’existence d’un paradis et ses 5 fils représentent les méchancetés sous toutes ses formes. Les grands arbres, les frères des kuans sont nés vanat Nia et la création et en connaissent les maléfices, ils sont sur terre pour aider les kunas.

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Ressources

Les hommes se concentrent sur la culture des noix de cocos.

Les cultures de subsistance sont celles du manioc, des bananes, du cacao, du riz, du maïs, des racines comme l’igname. Les femmes confectionnent les molas, fabriquent un artisanat utilitaire et de commerce. Les hommes fabriquent aussi les vanneries.

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Les molas

Un art exceptionnel


Les molas sont de véritables « tableaux » de tissu. Allant par paires, de taille rectangulaire (entre 30 à 50 cm de hauteur et entre 35 à 60cm de longueur), elles sont faites de plusieurs couches d’étoffe de couleurs différentes selon une technique dite d’appliqué inversé. Les motifs sont déterminés par des découpes réalisées dans les couches supérieures qui laissent voir les couleurs des couches inférieures. Des broderies et des éléments décoratifs de type patchwork peuvent compléter l’ensemble.

L’art des molas apparaît à la fin du XIXe siècle. C’est un « art de réaction », issu du contact avec les Blancs. Jusqu’à leur arrivée, les femmes allaient seins nus et se peignaient le corps. Plus tard, à partir d’un vêtement de type occidental qui leur fut imposé ou qu’elles voulurent imiter, elles ont exprimé leur différence en créant des molas, faites uniquement avec des produits empruntés : cotonnades et fils industriels, aiguilles et ciseaux d’acier.

Les molas disent la nature, le quotidien, l’imaginaire nourri par le mythe. Elles disent aussi l’art pour l’art. Elles témoignent de la passion créatrice et de l’admirable modestie d’une communauté de femmes. Vivant, original, plein d’humour, l’art des molas établit d’étonnants rapports avec la tradition, mais il rejoint aussi par maints aspects la création contemporaine.

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Ce mola, de style moderne a été fabriqué en 2004 par un maître du Mola, Venancio Restrepo. Il est basé sur le drapeau de Kuna yala

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L’agriculture

Chaque famille kuna choisit sa parcelle de terrain à travailler dans la forêt qui est vaste et peut contenir tout le monde. La grandeur du terrain est fonction de la taille de la famille. La parcelle est délimitée par des palmes de cocotier étendues au sol. Les récoltes sont ramenées en grande quantité aux villages à l’aide des pirogues. Les retours des champs avec les vivres sont soumis à une taxe communautaire. La taxe se paie en nature ou en noix de cocos le plus souvent. Le reste des noix de cocos sont vendues principalement aux colombiens. La Colombie en effet manque de noix de cocos. Le cocotier est omniprésent sur toutes les îles. 90% des îles sont inhabitées et sont des cocoteraies. Les noix de coco sont ramassées régulièrement. Il est interdit de prendre des noix de coco, c’est la propriété des Kunas.

La pêche se pratique en apnée et à la ligne et rarement avec des filets ou des casiers. Les dates de reproductions des espèces (crabes, langoustes) sont gérées par les sahila qui tentent de les faire respecter.

La chasse vient compléter l’alimentation de base.

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cocoteraie sur une île

Le cacao

Ils en consomment chaque jour ainsi qu’à l’occasion des événements : les naissances, la puberté, les décès. Le caco soigne lors des maladies où il est utilisé en fumigations accompagné de chants. Les kunas extraient le beurre de cacao et l’utilisent en le mélangeant au rocou pour se maquiller et avec le mageb, une plante médicinale ils fabriquent une pommade pour soigner les piqûres.

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La chicha

C’est une boisson alcoolisée à base de canne macérée préparée uniquement par des initiés. Il faut 12 jours de préparation et deux verres suffisent à provoquer l’ivresse. Les kunas boivent peu d’alcool pour préserver la sérénité des villages. Le samedi les sahila autorisent les hommes à boire de la bière. La chicha est réservée à la commémoration de la révolution (21 janvier), la pose de l’anneau d’or aux narines des jeunes filles, la cérémonie de la jora, le mariage, quelques anniversaires.

Les fêtes ont lieu dans l’ina kaipi ou la casa de la chicha, une sorte de salle des fêtes.

Education

L’éducation traditionnelle Kuna est du ressort de la famille. En revanche, l’éducation publique est réglementée par le ministère de l’éducation de l’état panaméen. Tous les enfants ne vont pas à l’école, leurs parents choisissent en fonction des affinités et des possibilités financières. Certes l’école primaire du village (1er au 6ème « grado ») est gratuite, mais les livres scolaires coûtent cher, et, ici comme ailleurs, ils changent chaque année avec les programmes. Pour suivre des études secondaires, il faut aller dans les plus gros villages – en pension chez l’habitant, à moins que toute la famille n’y déménage pour la durée de l’année scolaire (du 15 mars à Noël).

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Les cimetières kunas

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L’une des plus belles traditions kunas est la façon dont cette communauté s’occupe de ses morts. Les cimetières kunas se trouvent sur la terre ferme. Edifiés en hauteur, ils ressemblent, de loin, à un petit village aux toits de chaume. Les disparus sont enterrés dans leur hamac à 7 mètres de profondeur. Les deux morceaux de bois servant à soutenir le hamac encadrent le monticule de terre de part et d’autre du tombeau. Un toit de chaume le recouvre. Des objets ayant appartenu au défunt sont déposés avec lui. Tous les matins, des membres de la famille du mort passent quelques heures en sa compagnie et prennent leur premier repas du jour avec lui.

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La cérémonie de la jora ( inna mustiki)

Lors de ses premières règles, une jeune fille est enfermée pendant 4 jours dans une petite cellule de roseaux. Elle y est constamment baignée d’eau de mer. Cette douche cérémoniale se nomme en kuna l’Inna-mustiki. Pendant ce temps, le restant de la famille s’organise. Les adultes et les garçons de la famille dansent dans les rues. Ils sont habillés de rouge et portent des colliers faits d’os ou de corail. Le père, pendant ce temps, fabrique un panier en feuille de pandanus. Lorsque le panier est terminé, il part avec ses fils ainés et le shaman dans la forêt. Ils vont cueillir le fruit d’encre noire. Au bout des quatre jours, la jeune fille sera enduite d’encre noire extraite de ce fruit.

Ces quatre jours de cérémonies se clôtureront par une fête de la chicha. La jeune fille se fera couper les cheveux à la fin de la fête. Cette cérémonie se nomme en kuna « Inna-suit ». En se faisant couper les cheveux, elle reçoit son prénom en tant que femme. Afin de marquer ce passage à la femme accomplie un « kantule » (le chanteur attitré du village) chante la « dislaigala ». C’est une chanson qui raconte les différentes étapes de la cérémonie.

La musique

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La musique fait partie de leur vie aussi bien dans les rituels que dans la vie de tous les jours. Deux chants traditionnels et spécialisés demandent un don certain, une mémoire hors du commun et un long apprentissage. Les autres chants sont interprétés par tous et accompagnent la construction des maisons, l’éducation des enfants, les activités quotidiennes, la pêche, la vannerie etc.

Les instruments les plus utilisés sont la flûte de pan et les maracas.

La flûte de pan, gammu burwi est composée de 14 longueurs croissantes de bambou réparties dans un ordre particulier qui forme deux paires de flûtes. Chaque paire comprend une flûte de quatre éléments et une flûte de deux éléments.

Les maracas sont fabriquées avec des petites calebasses décorées dans lesquelles se trouvent de fins graviers. Un manche tressé en fibres est fixé sur les calebasses.

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 Caroleone

Pour en savoir plus, ne pas hésiter à consulter le blog sagapanama

Sources : Alain Fraysse ,sagapanama, wikipédia, gsevier.free, étoile de lune.net

Les « femmes Mola » ou la machine à images mythiques – coco Magnanville

Les « femmes Mola » ou la machine à images mythiques Adolfo Chaparro Universidad del Rosario, Colombie Résumé Cet article traite de la mola comme une marchandise, une œuvre d’art, un objet rituel…

http://cocomagnanville.over-blog.com/2020/09/l-art-de-la-mola-du-peuple-kuna.html?utm_source=_ob_email&utm_medium=_ob_notification&utm_campaign=_ob_pushmail

Artisanat du peuple Kuna (Guna ou Cuna) – coco Magnanville

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